Le jeudi 7 Novembre 2013 , la communauté Mouride dans toutes ses composantes et ses démembrements commémore la naissance de l'Iman des Imans Serigne Abdou Khadr MBACKé qu'on appelait affectueusement Boroom Bagdad. Le 4ème Khalif de Serigne Touba fut rappelé à DIEU le 13 mai 1990 après 11 mois de khalifat. Serigne Cheikh Ahmadou son actuel khalif entouré de ses frères est la maître d'oeuvre de cette cérémonie. Qui était Serigne Abdou Khadr MBACKE.
Serigne Abdou Khadre est né le vendredi 3 ème jour du moins de muharram de l’an 1333 soit 1914 de l’an romain au village de Darou Alîmou-Ikâbir plus connu sous le nom de Ndame, l’une des villes fondées par Cheikh Mouhamadou Bamba pour la lecture et l’apprentissage du Coran.
 Comme le voulait l’usage de la famille, le fils de Sokhna Aminata BOUSSO reçut à l’âge de 5 ans sa première formation coranique auprès de Serigne Abdou Rahmane LO à Ndame. Mais c’est à Guédé, à quelques kilomètres de TOUBA, chez son oncle Serigne Mbacké BOUSSO que s’acheva sa formation dans le domaine des sciences religieuses où il excella dans les hadiths et l’histoire de l’Islam.
 Sa passion était le savoir et la connaissance. Sa caractéristique était l’obéissance et la conformité à l’enseignement de Khadimou Rassoul, tout en restant fidèle aux recommandations de ses frères qu’il aimait et respectait. Il ne se disputait jamais et disait que les biens matériels et l’autorité ne l’intéressaient pas, car il avait donné sa totalité à Serigne Touba dont il espérait tout. Tant que l’enseignement de Serigne Touba demeurait vivace en lui, le reste n’avait pas d’importance.

Serigne Abdou Khadr reconnaissait sa mission comme étant la conformité à la sunna, ce qui lui valut le titre de IMAM EL MOURIDIN. On disait qu’il ressemblait à son père physiquement.
Serigne Abdou Khadr a été l’Imam de la grande mosquée de TOUBA pendant 21 ans durant lesquels il exhortait les Mourides à la connaissance et l’action dans la conformité du message prophétique. Il mettait toujours l’accent sur la rectitude et la lecture du Coran qui renferme tous les bienfaits ainsi qu’il l’enseignait à ses fils.
 De ces sages paroles qu’il proférait aux fidèles lors des Khoubs du Vendredi à la grande mosquée on retient en particulier celle-ci qui n’est autre qu’un viatique pour tout musulman : « INA SAADATA KOULOU SAADATA TOULOUL AMRI FI TAHATI LAHA » - « le bonheur tout le bonheur réside dans une longévité consacrée à l’obéissance à Dieu ».
 Son attachement à la prière en commun a fait qu’il a dirigé les (05) prières quotidiennes dans la mosquée de sa concession de Guédé puis de Touba de 1937 à son rappel à Dieu le 13 mais 1990 : un miracle, un vrai miracle.
 Ce saint homme profondément soucieux du bien être et de la quiétude de tous les musulmans, n’avait d’autres préoccupation que DIEU et son Prophète (PSL). Notre ami Madické WADE de Saint-Louis écrit dans son célèbre ouvrage sur le Mouridisme qu’au-delà de la Confrérie Mouride, Serigne Abdou Khadr était Cheikh Al-Islam.
Durant son imamat Serigne Abdou Khadr n’avait jamais manqué une prière à la mosquée qu’il avait bâti à son domicile, ni une prière collective à la grande mosquée de Touba à l’exception de la période de son pèlerinage à la Mecque et la dernière semaine avant son rappel à Dieu alors qu’il était malade. (Pour ce pèlerinage votre serviteur était chargé par Serigne Cheikh Gayndé Fatma de s’occuper des formalités de départ : délivrance des titres de voyage, passeports, certificat médical, versement du pécule etc…).
Les Mourides avaient d’ailleurs annoncé sa disparition quand il ne le virent pas à la prière de ce vendredi-là. Il avait souhaité avant sa mort en connaître les affres. C’est-à-dire tomber malade et subir les angoisses de l’agonie, en hommage au Prophète élu (PSL), Allah l’avait honoré de cela si bien qu les derniers jours de sa vie, il parvenait à diriger la prière chez lui en compagnie de ses intimes et des membres de sa famille.
 Les relations de Serigne Abdou Khadr avec ses frères étaient excellentes et très intimes, mais celles avec Serigne Saliouétaient particulières. Ainsi quand Serigne Saliou voulu prendre le Wird « Makhfouz », il écrivit une lettre à Serigne Mbacké BOUSSO lui demandant l’Izn, tout en précisant qu’il souhaitait la médiation de Serigne Abdou Khadr dans la transmission. Ce qui laissait Serigne Mbacké BOUSSO étonné de la foi de Serigne Saliou en Serigne Abdou Khadr.
Il est contestable que Serigne Abdou Khadr a laissé un souvenir d’un saint accompli. On en veut pour preuve :
 Ces prières miraculeuses dont bénéficiaient plusieurs musulmans sans distinction de race ou de couleur, tous revenaient ou écrivaient pour témoigner de leur satisfaction de leurs vœux exaucés. Il était réputé guérir toute maladie et malédiction. Il demandait au patient ou à son représentant d’apporter un verre d’eau sur laquelle le miracle est accompli après le récit à voix basse de quelques versets de la saint vulgate. Serigne Abdou Khadr avait consacré toute sa vie à la célébration de l’Unicité d’Allah et aux enseignements du Saint Livre. Ne disait-il pas ceci : « Priez à l’heure exacte, est la plus haute dimension de l’adoration de DIEU ».
 Armé d’une formation coranique et théologique poussée, l’Imam de la mosquée de Touba (depuis la disparition de Cheikh Falilou MBACKE en août 1968) s’est employé jusqu’à son dernier souffle, à hisser l’étendard de l’Islam dans son art d’enseigner la parole d’Allah.
Pour d’aucuns son Khalifat matérialisait le retour de Cheikh Ahmadou Bamba MBACKE dont la ressemblance avecSerigne Abdou Khadr serait frappante.
 Serigne Abdou Khadr était un soufi hors pair. Son pouvoir de pénétrer le secret de l’interlocuteur, d’aller directement à son cœur, le climat de sainteté qu’il crée d’emblée, sa force persuasion, ses rares qualités de cœur et d’esprit, voilà un des aspects qui sont à l’origine de sa sainteté.
Il reste hormis cela, bien entendu un mystère insondable, au-dessus de toute spéculation. Nul ne perce ce secret qui distingue Serigne Abdou Khadr des autres mortels, ce secret écrasant qui opère les miracles, qui épure les cœurs les plus enclins au mal et des dompte, qui transforme le mal en bien, qui élève et exalte. Ce pouvoir extraordinaire qu’il exerce sur les âmes, sur les esprits et sur les choses même et qui va chaque jour grandissant est une des merveilles de DIEU.
 Le mysticisme chez Serigne Abdou Khadr est admirable, il ne consiste pas à se claquemurer dans une existence de reclus, coupé du monde, mais dans la grande sagesse qu’il enseigne, on note la part considérable qu’il accorde aux relations entre personnes dans la société. Il recommande entre les hommes, la gentillesse, les bonnes relations et l’amitié sincère fondée sur la fraternité et la solidarité dans le bien et l’amour de DIEU.
 Etre utile surtout tout le monde. L’aumône, la dépense, le sentiment de solidarité entre humains.
Serigne Abdou Khadr est cet homme dont nous parle l’Iman GAZALI. Sa simple présence, sa simple vision produit sur le postulant un effet bénéfique. Un simple regard constitue pour celui qui le regarde une œuvre pie..
 Hormis l’exemple vivant qu’il offre, sa présence inspire à l’observateur la crainte de DIEU, le détachement des choses d’ici bas, l’amour de DIEU et de l’autre monde. Acte, paroles, regards, bref tous ses mouvements, tous ses gestes offrent des sources d’édification. Ses paroles allaient directement dans le cœur.
 Extrêmement habile et inspiré d’un secret infaillible, l’Imam de Touba utilise divers moyens et emprunte plusieurs chemins vers l’âme, s’adressant à la foi, au cœur et à l’esprit de chaque sujet suivant la personnalité de ce sujet. Ce miracle qui s’était produit à Touba en juin 1973 reste encore vivace dans les mémoires de tous ceux qui étaient présents ce jour-là au cimetière de Touba. En effet dans son humanisme, sa grandeur d’âme et sa générosité de cœur, l’Imam de Touba effectue souvent la prière mortuaire sur plusieurs morts. Ce jour cinq morts étaient alignés devant le cimetière attendant l’arrivée de Serigne Abdoul Khadr. Avant d’entamer la prière, il demanda à l’assistance de dégager le cinquième mort placé en catimini par ses parents. Celui-ci était récusé par l’Imam de Touba. Plus tard on saura que le récusé était un commerçant ayant pratiqué l’usure pendant plus de 40 ans. Ce qui le rendra multimillionnaire. Lorsque les parents du récusé tiendra au courant Serigne Abdoul Khadr de son activité commerciale illicite, il leur dira d’aller l’enterrer à Darou Salam il aura la chance de n’être pas interrogé dans la tombe.
 La vie de Serigne Abdoul Khadr se confond avec son imamat à la Grande Mosquée de Touba auquel il accéda en 1968, à la disparition du second Khalif Cheikh Mouhamadou FADL qui occupait en même temps cette fonction. C’est pendant les 21 années où l’imam Serigne Abdou Khadr dirigea les prières du vendredi et celles des fêtes religieuses que le Saint homme acquit la renommée d’être une source intarissable de la Chari ’a et de la Sunna. La générosité de cœur de l’homme de Dieu qu’il fut traduisait en permanence, auprès surtout des indigents sa compassion et sa largesse d’esprit. En plus d’une disponibilité légendaire qu’émaillait un sourire ineffaçable, il affichait, envers ses visiteurs toujours à l’aise pour communiquer avec sa sainte personne, une image de sérénité et de profonde compréhension d’un abord facile.
Il était investit d’une mission divine celle qui consistait à venir en aide aux nécessiteux, apprendre la sainte vulgate à des centaines de disciples et les mettre sur la voie de Dieu. On rapporte qu’une des qualités dominantes de Serigne Abdou Khadr est de se suffire de ce que Dieu lui a accordé. Il n’a jamais contracté de dettes de vie durant. C’est pourquoi un jour, après avoir prié sur un mort, il interrogea l’assistance en ces termes : avait-il contracté une dette dans sa vie ? la réponse est non. Il déclare alors : voilà la bonne voie. La voie de Siratal Moustakhine.
 En sus de ces hautes vertus, l’homme était aussi, à l’instar de ses autres frères, investi d’une dimension sociale qui se manifesta, lorsqu’en 1968, il défricha une importante superficie de terre arable à Bagdad à quelques kilomètres de Touba, où il s’installa. Il réalisera aussi à Boustan, près de Louga, un autre domaine agricole comptant 13 daaras. Il se lancera également dans la riziculture à Mboundoum, périmètre irrigué du barrage de Diama où il comptait également une importante exploitation.
La piété demeurait toujours un trait caractéristique chez cet homme si l’on réalise qu’il tint à ériger à chaque fois une mosquée dans chacune de ces concessions à travers à le pays.
Les rapports de Serigne Abdou Khadr avec tous ses parents étaient toujours empreints de cette révérence et de cette affection dont il irradiait et qui avait le pouvoir de le rendre aimable à tout cœur.
Son accession au Khalifat, le 18 juin 1989, fut marquée par sa personnalité en ce sens qu’elle fut l’occasion de prêches pour la conformation aux commandements divins et à la Sunna prophétique. Il insistait beaucoup sur les prières canoniques et celles surrégatoires contenues dans Safinatou Limane ouvrage écrite par son Père Cheikh Ahmadou Bamba.
 Le feu Cheikh Sohibou Ibn Khadimou Rassoul, homme de grande culture nous le rappelle dans son célèbre ouvrage dénommé Khouratil ayni.
 La trop brève durée de Serigne Abdou Khadr ne permit pas, cependant, toute l’expression de ces hautes vertus car le jour de vendredi 18 mai mai 1990, c’est-à-dire 11 mois jours pour jours après avoir revêtu le manteau du 4 èmeKhalif Serigne Abdou Khadr s’éteint à Touba. Et c’est depuis ce vendredi, jour de prière, qu’il repose à l’entrée de cette mosquée qu’il aimait tant et au sein de laquelle, 31 ans durant, il dirigea la prière de milliers de fidèles qui ne manquaient jamais de se précipiter d’affection, après l’office, vers la frêle silhouette toujours souriante de Fîli « Borom Bagdad ».

Talla Sidy Alboury NDIAYE -Chercheur en Islam


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